Les débuts de l’ACPUM avec Jean‑Louis Fortin, premier président, et ses vis‑à‑vis


Jean-Louis Fortin a été le premier président de l’ACPUM au moment de sa création en 1974. Appuyé par les autres membres fondateurs que sont Philippe Guay, Gaston Blais et André Maheu, Jean-Louis Fortin a dirigé les destinées de notre association jusqu’en 1978, après avoir signé le premier protocole d’entente avec l’Université de Montréal.

Il y a quelques mois, nous avons réuni monsieur Fortin avec Michel Lespérance, secrétaire général de l’Université de 1983 à 2005 et Pierre O. Dupras, qui a dirigé le Service du personnel de 1961 à 1995. 

Retour sur les événements entourant la création de l’ACPUM et l’origine des conditions de travail qui ont évolué au fil du temps, mais que le comité de négociation actuel s’affaire à améliorer!

Quel contexte prévalait au moment de créer l’ACPUM? 

Jean-Louis Fortin : 

Trois éléments importants. Le premier : la syndicalisation fraîchement réalisée à l’UdeM des professeurs et du personnel de soutien. Le deuxième : le regroupement en association, également fraîchement réalisé, de la majorité des cadres de la fonction publique et parapublique du Québec. Le troisième : le Rapport Deschênes, un rapport conjoint du Conseil de l’Université et de l’Assemblée universitaire, à la fin des années 60.

Pour donner suite à une recommandation du Rapport Deschênes, le recteur Roger Gaudry a mis sur pied, au début des années 1970, un comité ad hoc placé sous la responsabilité de Michel Lespérance pour faire le point sur le statut du personnel non enseignant. À la suite de la syndicalisation du personnel de soutien, l’accent a été mis exclusivement sur les cadres et professionnels. Des consultations ont été menées auprès des cadres pendant près de trois ans.

Michel Lespérance :

Le Rapport Deschênes a effectivement donné l’impulsion menant à la création de l’ACPUM. Au sein du comité ad hoc dont j’avais la responsabilité, nous souhaitions donner un statut aux cadres et professionnels et nous voulions que ces personnes  soient reconnues comme composantes à part entière de l’Université. Nous reconnaissions l’esprit institutionnel de leurs dirigeants. J’ai personnellement tout fait pour faciliter le rapprochement des points de vue du comité ad hoc et ceux du président fondateur de l’ACPUM et de ses collègues immédiats. Leur attachement institutionnel ne s’est jamais démenti!

 

Quelle a été la bougie d’allumage ayant mené à la création de l’ACPUM? 

Jean-Louis Fortin :

C’est sans contredit le Rapport du comité ad hoc! Au début de 1974, Michel Lespérance a transmis à l’ensemble des cadres son rapport en les invitant à le commenter. En passant, je lui lève personnellement mon chapeau, car l’ACPUM lui doit beaucoup. Ce rapport a rapidement été suivi d’un deuxième document intitulé «  Les dispositions additionnelles », qui ressemblaient étrangement au protocole des cadres et professionnels de l’Université Laval.

Au cours d’un dîner au Laurier BBQ, Philippe Guay, Gaston Blais, André Maheu et moi échangions sur nos impressions des deux documents du comité ad hoc. Arrivés au café et au dessert, nous avions décidé de fonder une association, sur le modèle des cadres scolaires du Québec.

Nous avons chacun consulté des collègues et rapidement, on s’est rendu compte que c’était LA solution. On a rapidement créé un comité d’implantation en mars 1974 avec 14 membres et en octobre, nous avions recruté 425 personnes… Un raz-de-marée puisque, à l’époque, à peu près personne ne connaissait son voisin. Les cadres et professionnels travaillaient la plupart du temps en silo.

Ensuite, nous avons créé trois sous-comités : un pour l’élaboration des statuts de la future association, un pour le recrutement des membres et un chargé de proposer un protocole, à partir des dispositions additionnelles.

Pour la petite histoire, nous avons fait une demande d’incorporation de l’Association au nom de « ACPUM », ce qui a été refusé, car le nom était déjà pris… Nous avons alors rencontré une personne d’importance à l’Assemblée nationale qui a suggéré d’apposer des points après chaque lettre, pour donner « A.C.P.U.M. ». C’est le nom officiel de votre association. Je crois qu’un président de l’ACPUM, chirurgien dans l’âme, a enlevé ces points de suture 25 ans plus tard!

Pierre O. Dupras : 

Je me souviens très bien qu’au début des années 70, le vice-recteur à l’administration, Roger Larose, avait explicitement exprimé son désaccord avec la création d’une association qui regrouperait les cadres et les professionnels, lors d’une entrevue publiée dans le journal Forum. Mais, de notre côté, nous sommes parvenus à le convaincre que c’était la meilleure chose à faire, et il s’est rendu à nos arguments. 

 

Une fois l’ACPUM créée, pourquoi a-t-il fallu quatre ans avant d’avoir un premier protocole? 

Jean-Louis Fortin :
Pour une seule raison. L’Université voulait exclure 85 cadres de l’application du futur protocole et, pour nous, c’était inacceptable.

En juin 1975, Paul Lacoste est devenu le nouveau recteur de l’Université et nous avons eu de très bons rapports avec lui.

Pendant trois ans, la direction de l’Université a persisté pour exclure 85 personnes de l’application du futur protocole, mais il n’en était pas question pour une raison très simple : la nature même de l’Université comme organisation nous imposait de faire front commun.

Pierre O. Dupras : 

Ce n’est effectivement pas la teneur du texte du protocole qui accrochait, et il n’y avait pas d’urgence, nous étions confiants d’arriver à une entente. Il n’y a pas eu de crise, nous avons toujours eu de bonnes relations, basées sur l’ouverture d’esprit et la collaboration, car nous avions tous intérêt à travailler ensemble. Tellement qu’aujourd’hui encore, Michel Lespérance, Jean-Louis Fortin et moi partageons à chaque deuxième mercredi du mois un repas amical qui nous rappelle notre attachement à l’UdeM!

Comment s’est jouée l’issue de pourparlers?

Jean-Louis Fortin : Au début de 1978, j’ai demandé à rencontrer le recteur Lacoste, seul à seul. Comme il n’était pas directement impliqué dans les négociations, j’ai pu lui expliquer les raisons pour lesquelles nous voulions représenter les 85 personnes qu’on nous demandait d’exclure.

La rencontre a duré près d’une heure. Nous avons notamment discuté du rapport du Conseil du patronat intitulé « Le malaise des cadres, un défi à l’entreprise », de la Conférence des cadres du Québec et de l’esprit de loyauté institutionnelle animant les cadres et professionnels de l’UdeM.

De retour à mon bureau, le téléphone sonne. On m’informe que le recteur a donné la directive à son vice-recteur à l’administration, Roger Larose, de signer le protocole sans aucune exclusion!

À la réunion subséquente du comité de négociations, Jacques Lucier, chef de la négociation pour l’UdeM, et ses deux collègues, Pierre O. Dupras et Normand Dandonneau, nous ont annoncé une bonne nouvelle : l’Université acceptait non pas d’éliminer les exclusions, mais d’en réduire le nombre de 85 à 25… Philippe Guay, Louise Joubert et moi avons en silence levé trois doigts, pour leur signifier qu’on n’accepterait que trois exclusions : les leurs! En bons gentlemen, ils avaient compris. 

Le protocole était signé officiellement quelques jours plus tard, soit le 8 avril 1978.

 

De gauche à droite : Jean-Louis Fortin et le recteur Paul Lacoste lors de la signature du premier protocole en 1978.

Les débuts de l’ACPUM avec Jean-Louis Fortin, premier président, et ses vis-à-vis

 

Jean-Louis Fortin a été le premier président de l’ACPUM au moment de sa création en 1974. Appuyé par les autres membres fondateurs que sont Philippe Guay, Gaston Blais et André Maheu, Jean-Louis Fortin a dirigé les destinées de notre association jusqu’en 1978, après avoir signé le premier protocole d’entente avec l’Université de Montréal.

Il y a quelques mois, nous avons réuni monsieur Fortin avec Michel Lespérance, secrétaire général de l’Université de 1983 à 2005 et Pierre O. Dupras, qui a dirigé le Service du personnel de 1961 à 1995. 

Retour sur les événements entourant la création de l’ACPUM et l’origine des conditions de travail qui ont évolué au fil du temps, mais que le comité de négociation actuel s’affaire à améliorer!

De gauche à droite : Jean-Louis Fortin, Martin Trudeau et Michel Lespérance

Quel contexte prévalait au moment de créer l’ACPUM? 

Jean-Louis Fortin : 

Trois éléments importants. Le premier : la syndicalisation fraîchement réalisée à l’UdeM des professeurs et du personnel de soutien. Le deuxième : le regroupement en association, également fraîchement réalisé, de la majorité des cadres de la fonction publique et parapublique du Québec. Le troisième : le Rapport Deschênes, un rapport conjoint du Conseil de l’Université et de l’Assemblée universitaire, à la fin des années 60.

Pour donner suite à une recommandation du Rapport Deschênes, le recteur Roger Gaudry a mis sur pied, au début des années 1970, un comité ad hoc placé sous la responsabilité de Michel Lespérance pour faire le point sur le statut du personnel non enseignant. À la suite de la syndicalisation du personnel de soutien, l’accent a été mis exclusivement sur les cadres et professionnels. Des consultations ont été menées auprès des cadres pendant près de trois ans.

Michel Lespérance :

Le Rapport Deschênes a effectivement donné l’impulsion menant à la création de l’ACPUM. Au sein du comité ad hoc dont j’avais la responsabilité, nous souhaitions donner un statut aux cadres et professionnels et nous voulions que ces personnes  soient reconnues comme composantes à part entière de l’Université. Nous reconnaissions l’esprit institutionnel de leurs dirigeants. J’ai personnellement tout fait pour faciliter le rapprochement des points de vue du comité ad hoc et ceux du président fondateur de l’ACPUM et de ses collègues immédiats. Leur attachement institutionnel ne s’est jamais démenti!

 

Quelle a été la bougie d’allumage ayant mené à la création de l’ACPUM? 

Jean-Louis Fortin :

C’est sans contredit le Rapport du comité ad hoc! Au début de 1974, Michel Lespérance a transmis à l’ensemble des cadres son rapport en les invitant à le commenter. En passant, je lui lève personnellement mon chapeau, car l’ACPUM lui doit beaucoup. Ce rapport a rapidement été suivi d’un deuxième document intitulé « Les dispositions additionnelles », qui ressemblaient étrangement au protocole des cadres et professionnels de l’Université Laval.

Au cours d’un dîner au Laurier BBQ, Philippe Guay, Gaston Blais, André Maheu et moi échangions sur nos impressions des deux documents du comité ad hoc. Arrivés au café et au dessert, nous avions décidé de fonder une association, sur le modèle des cadres scolaires du Québec.

Nous avons chacun consulté des collègues et rapidement, on s’est rendu compte que c’était LA solution. On a rapidement créé un comité d’implantation en mars 1974 avec 14 membres et en octobre, nous avions recruté 425 personnes… Un raz-de-marée puisque, à l’époque, à peu près personne ne connaissait son voisin. Les cadres et professionnels travaillaient la plupart du temps en silo.

Ensuite, nous avons créé trois sous-comités : un pour l’élaboration des statuts de la future association, un pour le recrutement des membres et un chargé de proposer un protocole, à partir des dispositions additionnelles.

Pour la petite histoire, nous avons fait une demande d’incorporation de l’Association au nom de « ACPUM », ce qui a été refusé, car le nom était déjà pris… Nous avons alors rencontré une personne d’importance à l’Assemblée nationale qui a suggéré d’apposer des points après chaque lettre, pour donner «A.C.P.U.M.». C’est le nom officiel de votre association. Je crois qu’un président de l’ACPUM, chirurgien dans l’âme, a enlevé ces points de suture 25 ans plus tard!

Pierre O. Dupras : 

Je me souviens très bien qu’au début des années 70, le vice-recteur à l’administration, Roger Larose, avait explicitement exprimé son désaccord avec la création d’une association qui regrouperait les cadres et les professionnels, lors d’une entrevue publiée dans le journal Forum. Mais, de notre côté, nous sommes parvenus à le convaincre que c’était la meilleure chose à faire, et il s’est rendu à nos arguments. 

 

Une fois l’ACPUM créée, pourquoi a-t-il fallu quatre ans avant d’avoir un premier protocole? 

Jean-Louis Fortin :
Pour une seule raison. L’Université voulait exclure 85 cadres de l’application du futur protocole et, pour nous, c’était inacceptable.

En juin 1975, Paul Lacoste est devenu le nouveau recteur de l’Université et nous avons eu de très bons rapports avec lui.

Pendant trois ans, la direction de l’Université a persisté pour exclure 85 personnes de l’application du futur protocole, mais il n’en était pas question pour une raison très simple : la nature même de l’Université comme organisation nous imposait de faire front commun.

Pierre O. Dupras : 

Ce n’est effectivement pas la teneur du texte du protocole qui accrochait, et il n’y avait pas d’urgence, nous étions confiants d’arriver à une entente. Il n’y a pas eu de crise, nous avons toujours eu de bonnes relations, basées sur l’ouverture d’esprit et la collaboration, car nous avions tous intérêt à travailler ensemble. Tellement qu’aujourd’hui encore, Michel Lespérance, Jean-Louis Fortin et moi partageons à chaque deuxième mercredi du mois un repas amical qui nous rappelle notre attachement à l’UdeM!

 

Comment s’est jouée l’issue de pourparlers?

Jean-Louis Fortin : Au début de 1978, j’ai demandé à rencontrer le recteur Lacoste, seul à seul. Comme il n’était pas directement impliqué dans les négociations, j’ai pu lui expliquer les raisons pour lesquelles nous voulions représenter les 85 personnes qu’on nous demandait d’exclure.

La rencontre a duré près d’une heure. Nous avons notamment discuté du rapport du Conseil du patronat intitulé « Le malaise des cadres, un défi à l’entreprise », de la Conférence des cadres du Québec et de l’esprit de loyauté institutionnelle animant les cadres et professionnels de l’UdeM.

De retour à mon bureau, le téléphone sonne. On m’informe que le recteur a donné la directive à son vice-recteur à l’administration, Roger Larose, de signer le protocole sans aucune exclusion!

À la réunion subséquente du comité de négociations, Jacques Lucier, chef de la négociation pour l’UdeM, et ses deux collègues, Pierre O. Dupras et Normand Dandonneau, nous ont annoncé une bonne nouvelle : l’Université acceptait non pas d’éliminer les exclusions, mais d’en réduire le nombre de 85 à 25… Philippe Guay, Louise Joubert et moi avons en silence levé trois doigts, pour leur signifier qu’on n’accepterait que trois exclusions : les leurs! En bons gentlemen, ils avaient compris. 

Le protocole était signé officiellement quelques jours plus tard, soit le 8 avril 1978.

 

De gauche à droite : Jean-Louis Fortin et le recteur Paul Lacoste
lors de la signature du premier protocole en 1978.